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les écrits fantasmagoriques
28 novembre 2020

Une peinture d'exception

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Saison, sujet de dissertation. J’ai pratiquement eu le droit à ce sujet durant toute ma scolarité en primaire et même durant le collège. Que pensez-vous du Printemps ? Ecrivez deux pages sur l’hiver, Pourquoi aimez-vous ou détestez-vous l’Automne ? Que faites-vous pendant l’été ? Et toujours, des réponses bateau, impersonnelles tellement elles se répètent :

Les feuilles rousses tombent en automne. L’herbe reverdit au Printemps. Il neige et j’ai froid en hiver. Le soleil brille toujours en été. Quel ramassis de conneries ! Parfois, je m’interroge sur ces rédactions durant lesquelles on devait écrire sans vraiment penser par soi-même. Et quand un élève le faisait, on criait au génie ou au cancre car la frontière est infime. Mais toujours, l’élève était mis au banc de la société parce qu’il n’entrait pas dans ses critères.

En pensant à ces souvenirs, je regardai le ciel bleu. Le ciel bleu, encore un mensonge puisque le bleu n’existe pas. Enfin, la pigmentation bleue est une invention de l’homme. Ce qu’on voit n’est qu’apparence. Le ciel est blanc, il est gris ou jaune, mais il n’est jamais bleu. Toutefois, l’illusion reste belle parce qu’on aime admirer le ciel bleu. Comme la mer mais à ce moment, j’étais en pleine campagne.

Je n’ai immédiatement pas remarqué le soleil déteindre sur le paysage. On ne fait jamais attention à son apparence jusqu’à ce qu’il soit couché. Alors, oui, il est magnifique de son jaune ou rouge flamboyant, il accompagne les champs, harmonie sublime, il rappelle l’œuf et son jaune, il rappelle à nous la naissance et la mort. C’est notre dieu car sans lui, on ne vivrait pas. Alors, je comprends mieux les incas, les aztèques ou les mayas et leurs sacrifices humains.

Mais c’était étrange car le ciel changea de couleur si vite que je ne m’aperçus pas qu’il commençait à faire nuit. Aussi, je repris ma marche en pensant à autre chose. Parce que cela n’allait plus. C’est à cet instant qu’elle apparut. Elle portait un seau et un énorme balai au bout duquel coulait une peinture jaune orangée similaire au ciel. D’ailleurs, elle observait ce ciel, affichant un sourire éblouissant. La peinture dégoulinait dans le champ transformant les tiges de lin en épis de blé. Il y avait de la magie en elle, cela aurait dû me faire peur, pourtant je ne me sentais pas inquiet.

Lorsqu’elle me vit, elle me salua en montrant ses jolies dents blanches et parfaitement alignées. Elle n’osa pas me parler toutefois, je compris par son regard et son insistance à montrer le ciel de la tête qu’elle voulait mon point de vue. J’approchai lentement, évitant d’écraser les épis encore frais. Après quelques échanges sympathiques, elle demanda mon opinion sur son œuvre. Je répondis qu’il était joli mais que je préférais le bleu. Alors, elle reprit mes propos en précisant que le ciel n’a jamais été bleu. J’ai pouffé de rire puis j’ai demandé pourquoi elle avait repeint le ciel. La raison était évidente, elle aimait tout simplement ces couleurs.

Puis elle exprima sa passion pour les tableaux bucoliques, les couchers de soleil. Elle raconta combien elle adore se promener dans un tel paysage ; elle s’y sent bien, elle respire un air frais aux saveurs de fruits, et quand il est chaud, il sent le pain sorti du four. Ses yeux pétillaient à la moindre explication, elle s’enthousiasmait si joliment que je ne pouvais que l’écouter avec attention. Mais avant de partir, elle regretta juste l’absence d’un petit couple en train de se câliner près d’un bosquet. Elle adore baisser les yeux et sourire en découvrant un couple allongé, faisant une sieste ou même l’amour dans l’herbe chaude.

Dès lors, je rougis car je pensais à celle pour qui mon cœur chavire. Elle aussi aime ces endroits isolés et ces moments intimes, seulement, elle les aime avec son compagnon, celui qui n’était pas moi. Je ne pus retenir un soupir et commençai à partir quand je levai la tête pour regarder le ciel. Un nuage passa sans faire de bruit, il apporta une touche de douceur dans ce ciel déjà calme. Tel un morceau de coton, il tamponna entre le jaune et l’orange, créant une étonnante frontière rose. Je fus émerveillé de voir ce magnifique tableau. Ainsi, je préférai m’assoir et l’admirer plutôt que de rentrer.

Surprise de me voir en tailleur, elle demanda si j’avais un souci. J’hésitai à répondre, les yeux toujours fixés sur le décor avant d’avouer qu’il manquait quelque-chose. « Quoi donc ? » questionna-t-elle. La bouche légèrement entrouverte, elle attendait ma réponse comme une révélation. Sa chevelure brillait à l’image du soleil au zénith. Je me suis demandé si elle n’était pas la fille d’Apollon. Après tout, elle venait de peindre le ciel. Alors, je murmurai : « Oui ». Ses yeux grossirent, persuadée n’avoir rien oublié. « Comme vous l’avez dit, il manque un couple pour admirer tout ça et surtout une épaule sur laquelle poser la tête. »

Elle déposa le seau ainsi que le balai qui lui sert de pinceau, et vint ensuite s’assoir à côté de moi. Mon coude effleura le sien. Nous regardâmes gentiment le ciel sans se parler. Je toussai légèrement et voulus briser le silence. Cependant son chut m’empêcha de parler. Puis, doucement, elle déposa sa tête sur mon épaule et nous restâmes ainsi pendant un moment avant que le soleil ne nous quitte définitivement.

Alex@r60 – novembre 2020

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  • Mes petits récits et poèmes érotiques et fantastiques ainsi que quelques souvenirs partagés. Bref une vraie petite librairie ou j'espère que tout le monde trouvera un truc chouette à lire
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