Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
les écrits fantasmagoriques
26 mars 2021

L'hôtel particulier (37)

auteur I-got-shot sur déviantart

Chapitre 37 : La chrysalide

Marc était venu avec une table de Ouija. En compagnie de Tatiana et de Sarah, nous posâmes un doigt sur la goutte attendant que celle-ci se déplace. Marc posa quelques questions du genre : « Esprit, es-tu là ? Si oui, déplace le verre en direction du mot oui. » Il expliqua à voix haute l’utilité de l’alphabet. Je restai attentif à cette méthode qui parut toutefois absurde. J’eus même la sensation d’entendre les enfants jouer à l’étage pendant la séance. Autant dire que le spiritisme ne donna rien.

Il proposa de recommencer dans le jardin, là où les restes humains furent trouvés. Sa copine Sarah le dissuada trouvant la méthode de plus en plus ridicule. Ensuite, nous passâmes une soirée agréable entre amis à discuter comme font les amis. Tatiana s’était surpassée pour préparer une vieille recette de famille à base de bœuf.

Après le départ du couple de Marc et Sarah,  Ma compagne s’installa dans la bibliothèque afin de lire en toute tranquillité. Malgré la nuit, elle laissa les volets de la pièce ouverts. Elle prit ses aises dans son fauteuil préféré et, à peine la première page tournée, le chat noir sauta sur ses genoux en ronronnant comme un moteur d’avion. Elle accepta l’animal qui s’allongea sur ses cuisses. Dès lors, elle lisait tout en caressant le félin, heureux de devenir l’attraction de la maison.

De mon côté, je m’assis sur un fauteuil opposé et après avoir lu une nouvelle de Maupassant, je surfai sur internet en utilisant mon smartphone. Puis, fatigué, je partis me coucher laissant Tatiana seule. Absorbée dans un silence complet, la maison parut sinistre, notamment les couloirs lorsque les lumières restaient éteintes. Je montai les marches lentement avec un peu de curiosité à l’esprit. Je voulais savoir quelle entité viendrait à ma rencontre ce soir. Les enfants, la fille à la recherche de Joseph ou Diane ? Ou quelqu’un d’autre ?

Comme cela arrivait souvent, Tatiana entra en me réveillant. Je feintai de dormir, ne bougeant pas. Elle s’approcha doucement laissant la chambre dans une obscurité totale avant de se déshabiller et d’entrer dans le lit. Je réalisai que depuis le départ de nos amis, nous n’avions pas discuté. Etrange sensation que de ressentir un malaise alors qu’il n’y en a pas. Tatiana remua sous les draps afin de trouver la meilleure position puis elle s’endormit aussi vite. Peu après son arrivée, la porte grinça. Les pattes du chat toquèrent le sol pendant son déplacement. Il s’arrêta à hauteur de mon amie, mais il repartit aussitôt. La porte se referma derrière lui.

Vers trois heures du matin, Tatiana avait disparu. Je devinai qu’elle était encore partie telle une somnambule dans les recoins cachés de la villa. Toutefois, je préférai ne pas la chercher. J’hésitai à descendre car à ce moment, Diane et la bande de fêtards envahissaient la grande salle. Aussi, je quittai le lit pour me rendre aux toilettes. Le temps d’uriner, de me laver les mains, de regarder mon visage dans la glace et de revenir, Tatiana était de retour.

Elle dormait sur le dos, la bouche entrouverte, la main droite posée sur le ventre tandis que la gauche demeurait contre son flan. Elle ne faisait aucun bruit. Avec la pénombre, elle ressemblait à une image en noir et blanc, une photo d’un temps ancien quand on inventa la photographie. J’approchai d’elle en silence. J’étais encore fatigué cependant j’eus l’envie de la contempler dans son sommeil. Elle était belle, blanche, rayonnante. Puis, je retournai à ma place et réchauffai mon corps à l’aide de la couverture. Il faisait terriblement froid !

Le temps de cligner les yeux, quelque-chose porta mon attention. J’observai en plissant le regard. Bien qu’embrumé, je constatai un changement radical dans la décoration de la maison. Les murs semblèrent soudainement tachés, le plafond écaillé, le lustre en piteux état, la maison semblait s’effondrer. Une fine couche de plâtre et de poussière recouvrait la couverture pourtant propre. Le bois du volet était plus abimé laissant passer les rayons de la lune par un trou dû au manque d’une latte. De même, cette soudaine lumière propice permit de constater l’état catastrophique de la chambre et surtout, l’apparence de Tatiana.

Elle restait toujours allongée sur le dos. Elle ne bougeait pas. Dès lors, j’approchai la tête pour mieux l’observer car je réalisai ne rien entendre venant de sa respiration. J’approchai et fus saisi de terreur en découvrant non pas Tatiana mais Marion. Elle dormait paisiblement. La peau grise et décharnée en certains endroits montra sans équivoque son état de repos éternel. Toutefois, ses cheveux étaient plus longs comme s’ils avaient poussé pendant sa mort. Je reculai devant cette vision d’horreur. Je retins un hurlement, quittai le lit et observai ce corps en partie décomposé. Je m’attendais à voir Marion lever la tête ou chercher à agripper mon bras pour m’emmener vers je ne sais quel enfer.

Cependant, il n’en fut rien ! Malgré la peur, je parvins à reprendre le contrôle de mes émotions en me persuadant être pris dans un délire organisé par la maison ou plutôt, par le satané chat. Marion ne bougea pas d’un pouce. Elle gardait cette position telle Blanche-Neige dans son cercueil de verre. Par contre, je ne voulais pas offrir de baiser. D’ailleurs, une odeur putride mêlant moisissure et rat crevé submergea la chambre.

Soudain, quelque-chose bougea sur sa peau ! Je ne remarquai pas de suite la provenance, mais cela sortait du cadavre par les pores qui grossirent à vue d’œil. Dès lors, une armée d’asticots grouilla dans le lit autours et sur  mon ex-copine. La décomposition s’accéléra au point de voir certains vers devenir des mouches. Elles volèrent envahissant la chambre. Elles se déposèrent le long de la fenêtre dont le bois pourrissait et laissait passer un léger courant d’air. Elles quittèrent la chambre en passant sous la porte.

Devant ce spectacle, je sentis mon corps frémir de terreur. Je tressaillis en entendant le sifflement des ailes d’une mouche frôler mon oreille droite. Je reculai jusqu’à coller mon dos contre le mur. Je sentis l’humide poisse qui remplaçait le papier-peint. Je n’osai pas fuir, mes jambes se paralysèrent brutalement et toujours, le cadavre de Marion restait allongé.

Tout-à-coup, la porte de la chambre s’ouvrit doucement faisant un grincement anormal. Personne ne se présenta dans le couloir. Toutefois, j’entendis un appel. A l’autre bout du couloir, la femme cherchait son Joseph. Il y eut des rires, pas ceux des enfants mais des rires d’adultes et un cri qui me terrifia. C’étaient les pleurs d’un bébé et il provenait du corps de Marion.

Malgré les traits décomposés, je pouvais discerner son visage. Il restait fermé. Mais, son ventre gonfla brusquement alors que les cris continuèrent. Je pris peur, me demandant si je devenais fou ou si je faisais un cauchemar. Je voulus m’enfoncer encore plus dans le mur poisseux. Et à l’instant, le plafond s’effondra comme un énorme filet de pêche saisissant une proie. Le corps de Marion reposait sous un linceul de poussière et de toile de d’araignée.

Je gardai encore mes distances, attendant de voir ce qui allait encore se passer. Une expiration sortit brusquement de la bouche du cadavre. Je reconnus, le soupir de Tatiana. Alors, la voyant bouger une main, j’approchai du corps qui reprenait vie. Tatiana tourna le buste afin de se mettre de côté bougeant en même temps l’énorme toile d’araignée qui en fait, s’avéra être le drap du lit. Je m’assis à ma place et observai mon amie dont le ronflement me rassura.

La décoration avait repris ses belles couleurs même si je ne pus les voir dans la nuit. Le froid laissa place à une température ambiante. Une fois installé, j’avançai la tête pour vérifier qu’il s’agissait bien de Tatiana. Aussi, j’embrassai timidement son épaule nue et m’endormis avant de repenser à ce rêve délirant.

Au réveil, Tatiana était assise à sa place, ses jambes voltigeaient dans le vide pendant qu’elle sentait une nouvelle rose bleue apparue pendant notre sommeil. Elle regarda les volets remonter automatiquement. Un rayon de soleil vint jusqu’à éblouir mes yeux. Il me persuada de me lever. Tatiana tourna ensuite la tête pour me souhaiter le bonjour. Elle souriait tout en reniflant la fleur. Mais, l’effroi me saisit lorsque je vis sur ses cheveux longs quelques fils de toiles d’araignée. Après un court instant, je dégageai ces restes de soie collante à l’aide d’un mouchoir. Elle passa la main sur sa chevelure puis nous fûmes soulagé de ne rien trouver d’autre ayant un lien avec les arachnides dans le lit ni autour du lit.

Alex@r60 – mars 2021

Photo par I-got-shot sur deviantart

Publicité
Publicité
Commentaires
les écrits fantasmagoriques
  • Mes petits récits et poèmes érotiques et fantastiques ainsi que quelques souvenirs partagés. Bref une vraie petite librairie ou j'espère que tout le monde trouvera un truc chouette à lire
  • Accueil du blog
  • Créer un blog avec CanalBlog
Publicité
Archives
Pages
Newsletter
Publicité