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les écrits fantasmagoriques
24 mars 2021

L'hôtel particulier (36)

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Chapitre 36 : Couloirs

La curiosité était plus forte. De même, je m’inquiétais de plus en plus au sujet des disparitions momentanées de ma copine. Elle disparaissait et réapparaissait aussi vite, affirmant qu’elle ne bougeait pas. Cela n’avait aucun sens. Alors, dans un premier temps, j’installais des caméras.

Il y en avait une dans la chambre, une autre dans le couloir face à la porte, une dans chaque couloir avec vue sur l’étage. J’en plaçais une dans les escaliers, dans la cuisine, la grande salle, le salon et même dans le grenier. Je voulais comprendre comment nous faisions pour disparaitre l’un de l’autre.

Au début, Tatiana se montra réticente mais après une longue discussion, je réussis à la convaincre. D’ailleurs, elle persista à dire que je disparaissais et non elle. Je me sentis soulagé parce que j’avais l’impression de violer notre intimité même si nous vivions ensemble. Par ailleurs, elle m’aida à les installer. Nous vérifiâmes que tout marcha correctement puis, nous attendîmes la nuit et nous nous couchâmes à l’heure habituelle.

Lorsque je me réveillais, elle avait disparue. Je partis la chercher un peu partout dans les couloirs. J’entendis les enfants jouer, des voix d’adultes rire et discuter pendant une réception dans la grande salle. Une musique venant du piano vint à mes oreilles. Tout parut normal. Je descendis les escaliers, je vis l’homme à l’accueil parler avec un couple masqué qui déposa leur manteau dans l’armoire prévue puis entrer dans la grande salle d’où un brouhaha de rires et de musique sortit violemment. Tatiana était ni dans la cuisine ni ailleurs au rez-de-chaussée.

Dès lors, je remontai les étages cherchant dans les chambres ou les salles d’eau. Elle n’était nulle part. Je commençai à désespérer lorsque je surpris une femme habillée d’une longue robe blanche transparente venir dans ma direction. Elle ne remarqua pas ma présence et sembla venir de ma propre chambre. Grâce à ses cheveux longs et peignés en chignon à la fois haut et relax ainsi qu’à sa démarche, je reconnus de suite mon amie.

Elle avança à travers les couloirs cherchant apparemment quelque-chose. Je préférai ne pas me montrer, la laisser aller où elle se rend habituellement. Je la vis entrer dans une chambre du second étage mais elle ressortit immédiatement. Alors, je préférai rester discret même si j’eus l’impression d’être facilement vu. Toutefois, elle ne regarda jamais vers moi continuant de déambuler à travers les couloirs.

Elle hésita à entrer dans une seconde chambre. Elle s’arrêta devant la porte mais reprit sa promenade en direction du couloir opposé. Je m’éloignai pour me cacher dans les escaliers. Elle passa presque devant moi. Elle portait dans la main gauche une rose bleue. Son visage, sérieux montrait aussi des traits que je n’avais jamais remarqués auparavant. Il y avait quelque-chose de grave dans le pincement de ses lèvres. Il y avait dans ses yeux des sortes d’étincelles en même temps qu’une certaine crainte. Elle entra dans la première chambre du couloir sur ma gauche, celle qui se trouvait juste au-dessus de notre ancienne chambre.

Cette fois, elle ne sortit pas de suite. Elle resta. Les minutes parurent longues, si longues que je pris l’initiative d’entrer. Avec les esprits, je m’attendais à tout. La fête battait son plein dans la grande salle, un couple monta rapidement les escaliers tout en riant. Ils se dirigèrent vers la chambre de Diane. Puis, les enfants revinrent et un cri, celui d’un bébé me glaça le sang.

Cependant, je pris mon courage à deux mains et ouvris la porte en la faisant claquer. La chambre était totalement vide. Il n’y avait rien ! Même pas les meubles que nous avions installés ! Je restai à réfléchir tout en découvrant le silence de la pièce car il n’y eut plus de bruit. La maison avait retrouvé son calme ! Je me dirigeai vers la porte menant à la salle de bain commune à l’autre chambre du couloir lorsqu’une silhouette frôla la porte en traversant le couloir. Tatiana venait d’apparaitre comme par magie !

Elle marchait d’un pas ferme pour aller jusqu’aux escaliers. La tête penchée vers le haut, elle hésita à accéder au grenier. Puis, elle posa son pied droit sur la première marche, le gauche suivit. Elle grimpa lentement, la démarche presque tremblante. Elle tenait toujours la rose bleue dans la main.

Chose étonnante, la robe de chambre translucide n’avait plus la même forme. Elle était plus brillante, montrant le contour de ses formes généreuses qui se dessinaient comme une ombre sur du papier blanc. Je suivis Tatiana discrètement laissant quelques mètres entre nous. Elle ouvrit la porte du grenier et entra dans un curieux labyrinthe de cloisons. En fait, ce dédale ne devait plus exister car je l’avais fait détruire durant les travaux. A la place, le grenier devait être entièrement vide à l’exception de la chambre verte située au fond. Je cherchai à la suivre mais je me rendis compte qu’il existait plusieurs directions dans ce labyrinthe. Quand je pensais être derrière elle, nous étions à l’opposé. Quand je croyais l’avoir perdu, nous étions à quelques pas seulement. Rien n’avait de sens entre ces murs de bois.

Afin de mieux évaluer la situation, j’arrêtais de marcher et écoutais attentivement pour comprendre ce qu’elle faisait. Cependant, je déduis qu’elle-même était perdue. Aussi, je l’appelais, espérant qu’elle réagisse et me rejoigne. Mais elle ne répondit pas à ma voix, continuant de se promener dans le labyrinthe qui parut soudainement plus grand que le grenier.

L’écho de ses pas n’aida pas, bien au contraire ! Par moment, j’avais l’impression qu’elle quittait l’endroit pour redescendre et parfois, elle semblait marcher plus vite jusqu’à courir. Son souffle résonna, elle soupira de temps en temps… à moins que ce soit moi ! En levant la tête, le plafond, la charpente parut plus basse. J’essayai de grimper par-dessus un mur, seulement le pan s’effondra me laissant à terre comme un con au milieu d’un tas de bois pourri. Je me relevai, recherchai un meilleur chemin pour retrouver la porte d’entrée mais je réalisai tourner en rond. Et puis, je vis l’impensable, là où j’avais cassé le mur, il n’y avait rien. Le pan était réparé laissant juste une fissure en forme de cicatrice à peine visible à l’œil nu.

« Surtout ne panique pas, Arthur ! » me dis-je à haute voix. J’appelai encore Tatiana qui ne répondit pas. Elle continuait de marcher puis une porte grinça. Je compris qu’elle venait d’entrer à destination. Cependant, je ne pus la retrouver. Alors, résigné, je décidai de faire demi-tour, enfin, de retrouver la sortie. Je passai des heures à marcher. Exténué, je retrouvais la porte du grenier. Dès lors, je redescendis jusqu’à mon lit où Tatiana dormait dans le plus simple appareil. Une rose bleue gisait à ses pieds.

A son réveil, la première chose que mon amie dit, fut sur ma pseudo-absence. Bien sûr que je n’étais pas dans la chambre puisque je l’avais suivi toute la nuit. Nous ne prîmes pas de petit-déjeuner, nous allumâmes l’ordinateur qui gérait les caméras et regardâmes chacune comme un film à grand spectacle. Elle montra une certaine excitation, persuadée avoir raison. Elle proposa même un pari qui me fit éclater de rire : un an de ménage en tenue de bonne sexy aussi bien pour elle que pour moi. Cela faisait longtemps qu’elle n’avait pas sorti une connerie de ce genre.

Après avoir visionné la caméra de la chambre à vitesse rapide, nous nous dévisageâmes car on ne comprenait rien de ce qu’on venait de voir. Nous n’avions pas quitté le lit allant même jusqu’à faire l’amour entre deux et trois heures du matin. Dès lors, nous observâmes les autres caméras et le résultat fut le même nous stupéfiant. Dans les couloirs, personne ! Dans les salles, personne et non plus ailleurs ! Seul le chat se promenait d’un couloir à l’autre levant la tête quelques fois pour fixer la caméra de ses yeux jaunes qui brillaient à cause de la vision nocturne. J’eus aussi l’impression de découvrir un petit sourire narquois sur sa gueule.

-          Ce n’est pas possible, dit-elle. Tu es forcément sur une des caméras.

Je restai muet. Je mordis ma lèvre inférieure tout en réfléchissant sur la nuit passée. Je ne pouvais pas l’avoir rêvée ni avoir rêvé les autres nuits. D’ailleurs, la rose bleu qui restait toujours posée sur le lit en était la preuve.

-          Est-ce que tu t’es levée, au moins pour aller aux toilettes ? demandai-je.

-          Je crois que oui, murmura-t-elle en réfléchissant.

Elle avait cette fâcheuse habitude de se lever pour aller uriner. Je dis « fâcheuse » car elle me réveillait toujours quand nous dormions ensemble avant son retour. Mais rien ne parut non plus sur la caméra de la chambre. A aucun moment, elle n’avait quitté le lit, mais cela ne sembla pas vraiment l’inquiéter.

Alex@r60 – mars 2021

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  • Mes petits récits et poèmes érotiques et fantastiques ainsi que quelques souvenirs partagés. Bref une vraie petite librairie ou j'espère que tout le monde trouvera un truc chouette à lire
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