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les écrits fantasmagoriques
23 janvier 2022

Transylvanie express (6)

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Lorsque le train arriva en gare, je fus surpris de voir autant de voyageurs attendre dans les couloirs pour sortir profiter de la ville. Un chef de gare proposait des prospectus imitant un gamin en train de vendre des journaux. Certains prirent une feuille de choux en échange d’une pièce, d’autres ne firent que passer à côté de lui sans même le regarder. Aussi, je décidai de récupérer le papier et j’eus bien fait, car il contenait un plan de la cité.

Venise baignait dans un brouillard complet. On ne voyait pas grand-chose des places et des monuments. Cependant, je pus me guider grâce aux passants rencontrés. Ils étaient amicaux et faisaient l’effort de s’exprimer en français. A leurs vêtements folkloriques et leurs masques, je compris que le carnaval durait toute l’année. Ne voyant donc rien du paysage, je décidai d’entrer dans le musée le plus proche, un petit musée d’art.

C’était une villa de trois étages où un célèbre mécène aurait vécu. N’ayant pas retenu son nom, je ne peux rien dire de plus. J’entrai, payai un ticket et commençai la visite. Plusieurs pièces proposaient un mixte de tableaux et de statues, notamment de style gréco-romains. Il y avait aussi les bustes d’habitants célèbres dans la ville ; des personnes que je ne connaissais pas parce qu’inconnus dans mon monde. Par ailleurs, j’admirai les tableaux dont la majeure partie furent peintes par des artistes locaux ainsi que par quelques français et anglais. Je découvris que Venise était apprécié pour son charme. Je pus ainsi admirer les paysages que la brume m’empêchait de voir.

Je grimpai les marches et découvris que le second étage présentait les mêmes caractéristiques. J’observai chaque œuvre, lisant le titre sur étiquète collée sur le côté du tableau ou de la sculpture. Je piétinai commençant à sentir la faim tenailler mes tripes. Aussi, je décidai d’accélérer le pas pour sortir et trouver un restaurant proche. Pour cela, je devais suivre le sens de la visite, grimper à l’étage et redescendre de l’autre côté du musée. J’avançai dérangeant par moment les visiteurs avec l’écho de mes pas, où juste en regardant un tableau intéressant sans respecter la file indienne.

Le  dernier étage présentait des œuvres contemporaines. Je remarquai une œuvre semblable à un Picasso, un autre rappelant Dali. Mais il y avait surtout des natures mortes, des peintures de pommes, de poires et de vases fleuris. Je regardai de loin, jusqu’à ce que je remarquasse la silhouette de Ludmilla. Je pris peur en me rappelant la nuit d’avant. Je n’osai pas m’approcher d’elle. J’imaginai déjà ses yeux en train de fondre pendant qu’elle me pourchasserait. Toutefois, nous n’étions pas seuls, alors, prenant mon courage à deux mains, après avoir inspiré un grand coup, je décidai d’aller à sa rencontre.

Son sourire fit oublier mon cauchemar de la nuit. Elle tendit la main que j’embrassai timidement. Elle n’avait pas coiffé ses longs cheveux d’un chignon, les laissant plutôt retomber sur les épaules. D’un simple regard, elle m’invita à partager la visite.

-          Je ne pensais pas que vous aimiez l’art, murmura-t-elle.

Le plancher ciré craqua sous nos pas. J’observai le tableau qu’elle admirait. C’était un grand bouquet de fleurs mélangeant différentes couleurs. Il n’avait rien d’extraordinaire.

-          J’apprécie sans trop connaitre, répondis-je. J’avais surtout envie de me dégourdir les jambes.

-          Je vous comprends, dit-elle en riant. J’avoue ne pas trouver ce musée fabuleux…

-          Mais c’était le plus proche de la gare, intervins-je.

Son sourire éclatant répondit à la place de sa voix. Tout au long de notre marche, elle tenait son sac des deux mains. Nous parlâmes discrètement afin de ne pas déranger. De plus, nous n’étions plus intéressés par les ouvrages qui se ressemblaient pratiquement toutes. Alors, nous sortîmes de la villa et décidâmes de déjeuner ensemble.

Très vite, nous fûmes accostés par un vendeur de masques. Il nous prenait pour couple d’amoureux, et dans son langage jovial, il sut me soutirer un peu d’argent, contre deux magnifiques masques en cuir recouverts de parures dorées et argentées. Dès lors, Ludmilla s’amusa avec son masque, jouant les dames de la haute société en imitant leur démarche maladroite. Ainsi elle dévoilait qu’elle n’était pas originaire d’un milieu noble.

-          Me reconnaitriez-vous si je vous rencontrais avec ce masque ?

-          Je pense que oui, répondis-je.

-          Vraiment ? Et à cause de quoi ?

-          Vous avez… Déjà votre parfum qui est unique. Et il y a quelque chose en vous qui rayonne.

Elle ne répondit pas, se contentant de baisser la tête pour cacher ses joues rouges malgré le masque sur son visage. Nous marchâmes dans les petites rues de Venise jusqu’à arriver sur la place Saint Marc. Ça grouillait de monde devant le palais des Doges. Beaucoup discutaient en petits groupes, attendant pour entrer visiter la basilique. Avec le tumulte et le brouhaha, l’endroit contrastait fortement avec ma vie dans le train où, je ne voyais pas grand monde si ce n’est les mêmes personnages. Nous traversâmes la place tout en appréciant l’endroit, bien que la brume demeurât toujours imposante. Les gens allaient et venaient. Je sentis Ludmilla approcher son épaule de la mienne par peur de s’égarer. Cependant, je l’invitai à entrer dans un restaurant visible.

Nous eûmes énormément de mal à nous faire comprendre par le domestique de l’accueil. Toutefois, un serveur ayant des notions de français, se présenta et proposa une table agréablement située près d’une cheminée. Avant de s’assoir, Ludmilla retira son manteau, dévoilant une robe rouge, à la fois belle et sobre ; loin de la robe de notre premier repas ensemble. Elle s’amusa à garder le loup sur son visage et m’invita à en faire autant. Je jouai le jeu.

-          Je suis surpris de ne pas voir votre mari, dis-je. Je vous entends parler quand je suis dans ma cabine.

Elle ne réagit pas, préférant observer les cuisiniers en train de travailler. Le serveur apporta un pichet de vin qu’il posa sur la table.

-          C’est du vin de pays, dit-il avec un terrible accent. Si vous n’aimez pas, je peux apporter autre chose.

Je bus une gorgée mais n’étant pas amateur de vin, je ne pus dire s’il était bon. Cependant, je fis un signe de la tête pour accepter le pichet. Peu de temps après, le serveur arriva avec deux pizzas que nous venions de choisir. Nous mangeâmes avec les doigts, Ludmilla trouva cela amusant.

Soudain, les clients les plus proches se mirent à crier. Un pigeon venait d’entrer dans le restaurant. Nous regardâmes l’animal marcher. Je lui trouvai une étrange allure, jusqu’à ce que je réalise qu’il s’agissait d’un automate. L’animal mécanique s’arrêta subitement. Il ouvrit le bec puis fit demi-tour pour ressortir du magasin sous les applaudissements des clients.

-          C’est vrai que nous sommes dans la ville des automates. J’aimerais bien visiter l’ile où ils sont fabriqués, annonça ma nouvelle amie.

Je ne savais pas de quoi elle parlait, néanmoins, j’acceptai de l’accompagner vers cet endroit mystérieux. Après être rassasiés, nous nous dirigeâmes vers le quai qui proposait des navettes en direction de l’ile. Je ne vis rien à l’horizon sur la mer ; la faute au brouillard toujours épais et tenace. Nous attendîmes un bateau après avoir pris quelques renseignements et payé notre place. Un vieil homme assis sur un banc m’observait en plissant les yeux. Il ne portait pas de masque mais une capuche sur la tête. Il y avait dans son regard, une grande mélancolie et énormément de tristesse, mais aussi, une part de colère.

Lorsque la navette s’approcha suffisamment pour être visible de tous, il fut le premier à se lever et à attendre pour monter dessus. Ludmilla agrippa ma main et murmura à l’oreille :

-          Ne vous éloignez pas. Cela m’embêterait de vous perdre.

Alex@r60 – janvier 2022

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  • Mes petits récits et poèmes érotiques et fantastiques ainsi que quelques souvenirs partagés. Bref une vraie petite librairie ou j'espère que tout le monde trouvera un truc chouette à lire
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